Le guide du Tee-shirt

Le guide du Tee-shirt

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Nous sommes en juillet 1919 quand l’éditeur Maxwell Perkins accepte de publier le premier roman d’un certain Francis Scott Fitzgerald. L’envers du paradis paraît quelques mois plus tard et brosse, en même temps que celui de son héros Amory Blaine, le portrait d’une jeunesse déboussolée, noyant dans le jazz et l’ivresse le souvenir traumatisant de la Grande Guerre. Dès le premier chapitre, les lecteurs de celui qui deviendra le chef de file de la Génération Perdue découvrent un mot que personne n’avait encore couché sur papier : « T shirt ».

Telle est, à en croire l’Oxford English Dictionary, la première occurence du mot noir sur blanc.

L’histoire d’une icône

Derrière l’anecdote, il est une réalité historique qu’il nous paraît important de relater pour introduire l’histoire de cette pièce devenue culte. En effet, c’est sur les épaules des militaires américains que le T-shirt tel que nous le connaissons aujourd’hui vit ses premières heures de gloire. S’inspirant des maillots de corps en flanelle de laine prisés par la marine britannique, l’US Navy met au point un tricot à manches courtes en coton et décide d’en faire le sous-vêtement officiel de ses uniformes dès 1913. Arrière-petit-fils des chemises de nuit médiévales et petit-fils des combinaisons type Long John ou Union Suit, cette maille à col rond trouvera facilement son nom grâce à sa célèbre forme en « T ».

À cette période, le T-shirt n’est encore qu’une pièce de dessous, et les marins ont besoin d’une autorisation hiérarchique pour le porter sur le pont sans veste ni chemise. Ce n’est qu’à la fin de la Guerre qu’il retrouve la terre ferme en même temps que les soldats, et que ces derniers commencent à le porter tel quel. Il ne faudra qu’une poignée de semaines aux sportifs et aux jeunes pour percevoir tout le potentiel de cette pièce, et moins encore à Fitzgerald pour l’intégrer à la garde-robe de son héros en partance pour Princeton.

Durant toute la première moitié du 20ème siècle, des marques comme Hanes, Sears et Fruit of the Loom lutteront ainsi pour le contrôle de ce marché prometteur, tentant par tous les moyens de changer l’image « sous-vêtement » du tee-shirt, largement ancrée dans les esprits.

Catalogue Sears, 1938.

Plus encore que la publicité, c’est (à nouveau) la guerre qui permettra au « tee » d’entrer dans la légende. Définitivement cette fois. Sur le dos des GI, et soutenu par une intense propagande guerrière, il incarne aux yeux du monde une certaine idée de la puissance États-Unienne et de l’Amérique victorieuse.

Couverture du magazine Life, 13 juillet 1942.

Cette Une, particulièrement osée pour l’époque, a nettement contribué à l’émancipation du tee-shirt comme à son inscription dans un imaginaire composite : force tranquille, masculinité triomphante, American way of life etc.

Dès la fin du conflit mondial, c’est - comme souvent - le cinéma qui achèvera de porter ce vêtement au pinacle. Dans un registre semblable, il éblouira le monde entier sur les épaules de Montgomery Clift (Une place au soleil, 1951), Marlon Brando (L’équipée sauvage, 1953) ou encore James Dean (La fureur de vivre, 1955).

Wolf Tracer Archive / Photo12 via AFP

Ambigu et énigmatique, fils prodigue du pyjama et de l’uniforme militaire, admirable pour certains et indécent pour d’autres, le tee-shirt obtient ainsi le statut de pièce à part entière dans les années 50-60. Toléré plus qu’admis, il s’impose comme « outershirt » (ou « vêtement de dessus ») et se montre ainsi aux yeux de tous.

À l’air libre, il libère son plein potentiel et apparaît comme un véritable espace d’expression que les marques, organisations et collectifs s’empressent d’occuper. Aussitôt après sa consécration, il devient support de communication : campagnes électorales, revendications politiques, slogans contestataires, opérations marketing, messages humoristiques, tout est prétexte à la personnalisation et le tee-shirt uni cède rapidement du terrain à son homologue sérigraphié. À son design iconique s’ajoute une dimension d’appropriation et d’expression personnelle, laquelle ajoute encore au palmarès de ce tricot à nul autre pareil.

Pour la première fois en 1948, Thomas Edmund Dewey utilise le tee-shirt comme instrument de propagande politique lors de la campagne présidentielle.

Né de l’évidente union du confort et de la fonctionnalité, le tee-shirt peut-être considéré comme une pièce totale. En 110 ans d’existence - sous sa forme contemporaine du moins, il a en effet assuré toutes les fonctions, jusqu’à devenir le symbole même d’un secteur en proie à la frénésie. Sous-vêtement et tenue de combat, habit de sport et maillot de corps, objet marketing et symbole de protestation, puissance de ralliement et marqueur social, teint, déteint, imprimé ou brodé, travaillé par l’ultra fast-fashion aussi bien que par les plus grandes Maisons de luxe, il s’est imposé au fil des décennies comme le basique le plus vendu de la planète.

Plus étroitement liée que toute autre à celle de l’industrie textile, la trajectoire du tee-shirt révèle un emballement exponentiel et les dérives qui y sont systématiquement associées : délocalisation motivée par le profit, absence de traçabilité, utilisation de matières premières bon marché (synthétiques et/ou de mauvaise qualité), exploitation humaine, épuisement des ressources naturelles et énergétiques, pollution des sols, des eaux et de l’atmosphère etc.

Aujourd’hui plus que jamais, le tee-shirt incarne le plus beau visage du vêtement, aussi bien que sa face la plus sombre. Pierre angulaire de tout vestiaire et emblème de la folie consumériste, écoulé à milliards d’exemplaires chaque année, il semble capable du meilleur comme du pire, raison pour laquelle Hast s’est affairée à défendre son honneur. Et le vôtre par la même occasion.

Anatomie du tee-shirt

Vous l’avez compris, un tee-shirt est un tricot à manches courtes dont la forme de «T» lui a offert son nom. Ceci étant dit, plusieurs éléments peuvent varier d’un tee-shirt à un autre, de sorte qu’il est difficile d’en trouver deux identiques :

  • La matière : d’abord en laine puis en coton, le tee-shirt contemporain peut compter sur un large choix de fibres pour habiller son étoffe. À l’échelle de l’industrie, le polyester et le coton se placent en bonne position, mais le lin, le chanvre, le mérinos, le ramie et d’autres fibres artificielles (lyocell ou viscose) permettent d’imaginer des alternatives et des mélanges intéressants. Chez Hast, nous ne travaillons que des matières premières naturelles, raison pour laquelle le coton biologique et le lin ont nos faveurs.

  • La coupe : historiquement proche du corps, le tee-shirt ne s’est pas cantonné à son rôle de maillot de corps et s’est permis, à travers les âges, quelques expérimentations en matière de volume. Aussi l’avons-nous vu tantôt large et ample (dans les années 90 notamment), tantôt slim et long. De notre côté, nous avons préféré rester fidèles à ses proportions les plus classiques et harmonieuses : une coupe droite tombant parfaitement sur les hanches, efficace dans le pantalon comme en dehors.

  • Le col : rectangulaire chez les marins de la Royal Navy, rond du côté de la Marine américaine, en V à l’occasion, tout (ou presque) est possible sur un tee-shirt en matière de col. En ajustant sa forme, son échancrure et sa construction, il est possible d’obtenir des résultats plus ou moins originaux pour faire varier les registres. Sur nos portants, vous ne trouverez cependant rien d’extravagant ni de farfelu : nos cols sont ronds, parfaitement proportionnés et montés avec le plus grand soin. À notre humble avis, c’est absolument le meilleur ratio élégance-confort-polyvalence.

  • La longueur des manches : il suffit de jeter un œil à la photo de Marlon Brando pour s’en convaincre, les manches d’époque étaient spectaculairement courtes. Elles remontaient loin au-dessus du biceps et affichaient une courbure assez peu esthétique. Considérant qu’il s’agissait alors d’une pièce que l’on portait sous d’autres vêtements, nous ne trouvons pas grand chose à y redire, mais force est de reconnaître que ce dessin serait malvenu aujourd’hui. Trop courtes ou trop longues, les manches du tee-shirt ont tendance à déstructurer la silhouette (de même que la barre du « T » ne saurait raisonnablement grandir ou rapetisser sans heurter le regard). Dès lors, vous verrez que les nôtres s’arrêtent peu ou prou à mi-biceps, ce qui nous paraît être la longueur idéale.

  • Le montage : contrairement à une chemise, un tee-shirt est tricoté (et non tissé). Pour cette raison, il peut éventuellement être monté d’un bloc - sans coutures latérales - à l’aide de machines à tricoter spéciales. Dans ce cas, il est dit « tubulaire ». Sinon, les panneaux de maille sont assemblés classiquement pour donner sa forme à la pièce, auquel cas vous trouverez les fameuses coutures au niveau des flancs.

  • Les fantaisies : en s’émancipant de la catégorie des sous-vêtements, le tee-shirt n’a pas tardé à faire valoir ses droits en matière d’originalité. Sérigraphies, broderies, poche poitrine : toutes se sont faites une place au soleil sur le plus célèbre des tricots. Chez Hast, la sobriété et le chic intemporel font partie intégrante de notre ADN, raison pour laquelle nous construisons nos collections avec modération et tempérance. Ceci étant dit, nous n’avons pas peur d’oser un pas de côté à l’occasion, soit en inscrivant nos valeurs au cœur de nos tee-shirts, soit en y ajoutant un petit supplément d’âme.

  • La couleur : secret de Polichinelle, les progrès de la teinture ont permis d’étendre à l’infini le choix des coloris dans le textile. Vêtement universel s’il en est, le tee-shirt ne fait évidemment pas exception. Des célèbres tie & dye hippies à nos palettes chromatiques actuelles, l’histoire d’amour entre la couleur et cette pièce culte ne date pas d’hier. Chez Hast, nous travaillons des nuances classiques et d’autres plus osées, le tout en recourant à des savoir-faire variés. D’une part, il est difficile de faire plus naturel que nos créations no-dye qui ne sont tout simplement pas teintes. De l’autre, nous mobilisons différentes formes de teinture pour sublimer nos pièces colorées : le garment dye consiste en une teinture du vêtement après montage, ce qui lui donne un aspect subtilement délavé ; tandis que la teinture en fil ou en rouleau dévoile une tonalité nettement plus uniforme. En fonction du registre dans lequel vous souhaitez inscrire votre tenue, l’une ou l’autre fera certainement son petit effet.

Les avantages des tee-shirts Hast

Sur les 100 milliards de vêtements neufs vendus chaque année dans le monde, le tee-shirt termine bien souvent sur la première marche du podium. Devenu au fil du temps un symbole de la mode jetable et de l’hyper-consommation, sa production déraisonnable fait l’objet de critiques croissantes : utilisation de fibres bas-de-gamme, usage excessif de ressources naturelles, pollution des eaux et des sols, exploitation des agriculteurs et ouvriers etc.

Face au désastre humanitaire, sanitaire et environnemental, il était important pour nous de proposer à nos clients une alternative respectable et responsable. Comme indiqué dans notre article conseil pour identifier un tee-shirt de qualité, nous avons soigné chaque étape de notre chaîne de production pour vous garantir une pièce digne à tous égards. Fibres 100% naturelles pour votre santé et celle de la planète, choix de matières labellisées pour satisfaire à nos exigences sociales et écologiques, grammage important pour la résistance et la durabilité, palette chromatique simple et efficace associant no dye et garment dye, confection européenne assurée par des artisans que nous connaissons personnellement : autant de garanties qui vous permettront d’investir en confiance et en conscience. C’est aussi ça, l’honnêteté.

Le cas particulier du polo

De nos jours, il serait facile de prendre le polo pour un simple tee-shirt orné d’un col de chemise. Pourtant, leurs parcours sont bien différents et méritent que l’on s’y attarde un instant. À la différence des racines européennes du tee-shirt, c’est en Inde qu’il faut se rendre pour trouver celles de son homologue. Et plus précisément sur les terrains de polo, sport équestre d’élite importé des steppes d’Asie centrale. Sous l’influence du Maharadjah de Jodhpur, les joueurs raccourcissent les manches et la longueur de leur chemise, cousent des boutons au col pour éviter qu’il ne vole au vent et inventent, presque involontairement, la « polo shirt ».

Joueurs de polo de Manipur, 1875. Crédits : Bourne and Shepherd

Rapatriée sur le Vieux Continent par les colons britanniques, il faudra attendre les années 1920 et un certain Jean-René Lacoste - tennisman de son état - pour lui donner son esthétique définitive.

Jean-René Lacoste en 1927. Crédits : Getty

En un siècle, celle-ci n’a d’ailleurs pas bougé d’un millimètre, ce qui paraît être l’apanage des pièces de légende.

Chez Hast, nous l’interprétons conformément à cet itinéraire mythique, en couplant la facilité du tee-shirt et l’élégance de la chemise. À manches courtes en coton supima bio ou à manches longues en laine mérinos, il ne fait aucun doute que vous trouverez celui dont vous rêvez.

Porter le tee-shirt en deux leçons

Parenthèse fermée, revenons-en à nos tee-shirts. À notre connaissance, il n’y a que deux manières de les porter : seuls ou accompagnés.

Dans le premier cas, et selon l’effet recherché, vous pourrez miser sur la sobriété absolue ou sur le pas de côté. Généralement, seul l’été permet d’arborer le tee-shirt sans escorte, ce qui vous permettra de varier les plaisirs et les coloris. Du classico-classique (et indétronable) modèle blanc aux versions plus colorées, vous n’aurez qu’à tester pour trouver votre assortiment préféré.

Dans le second cas, le champ des possibles est nettement plus vaste. Dans ce registre, le tee-shirt retrouve son statut d’antan et joue, comme autrefois, les seconds rôles. Ceci étant dit, il n’est pas relégué au rang de sous-vêtement stricto sensu, et s’affirme plutôt comme adjuvant dans un layering. Une manière de se faire remarquer en toute discrétion.

En montrant le bout de son nez sous une chemise et/ou une veste de travail ou un blazer, vous montrerez en réalité bien plus que ça : un goût prononcé pour l’élégance décontractée, une maîtrise empreinte de désinvolture, la science du casual chic.

La question de l’entretien

Comme toutes les pièces de dessous en contact direct avec la peau, le tee-shirt compte parmi ces vêtements qu’il convient de laver après chaque port. Heureusement, c’est une pièce relativement facile d’entretien, lequel ne nécessite que quelques précautions d’usage. Chez Hast, nous vous conseillons de passer votre tricot en machine sur l’envers (pour éviter d’endommager le recto en cas de frottement) et de limiter l’essorage à 400 ou 600 tours par minute. Selon la matière de votre article, vous pourrez opter pour un programme délicat ou non, sans dépasser les 30°C. Pour éviter le risque de déformation et limiter la décoloration, le séchage se passera à plat et à l’abri de la lumière directe du soleil. De son côté, le repassage est parfaitement envisageable, à condition de choisir une température adéquate - plus ou moins élevée selon que votre habit soit en lin, coton ou laine. Rien de sorcier, donc, mais rien d’anodin non plus. Le respect de ces subtilités peut en effet doubler voire tripler l’espérance de vie d’un tee-shirt, ce qui n’est pas rien quand on considère qu’il s’agit de la pièce la plus débarrassée à l’échelle internationale.

Le mot de la fin

Entre hommage, éloge et archéologie de la mode, nous avons parcouru ensemble la folle histoire du tee-shirt et de son interprétation chez Hast. Véritable légende de l’habillement, il est aujourd’hui l’article le plus vendu dans le monde, avec ce que cette suprématie comporte de bon et de moins bon. Fidèle à nos valeurs d’honnêteté et de responsabilité, nous travaillons de notre côté des modèles dignes et durables avec l’ambition d’assainir sa chaîne de production. Designs intemporels, matières naturelles nobles, confection 100% européenne et finitions soignées : nos tee-shirts sont autant de promesses d'élégance et de durabilité, pour vous permettre d’entrer dans la légende en toute conscience.

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